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Influences réciproques entre sommeil et émotions, en lien avec les conflits parent-adolescent

Dernière mise à jour : 4 oct. 2022

Synthèse de l’article : Bilsky, S. A., Friedman, H. P., Karlovich, A., Smith, M., & Leen-Feldner, E. W. (2020). The interaction between sleep disturbances and anxiety sensitivity in relation to adolescent anger responses to parent adolescent conflict. Journal of Adolescence, 84, 69-77. https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0140197120301317

Synthèse rédigée par Fatiha TESSA, étudiante en Master 2 Psychologie du développement Université Paris 8.

En quoi les conflits parent-adolescent pourraient-ils expliquer les troubles du sommeil et les émotions négatives des adolescents ?


D’après Bilsky et al. (2020), la colère et le niveau d’anxiété des adolescents, provoqués par le conflit parent-adolescent pourraient apporter des éléments de réponse pour comprendre les troubles du sommeil rencontrés. Le conflit est un état d’opposition qui est chargé d’émotions comme la colère, l’anxiété. La colère renvoie quant à elle à un état émotionnel associé à des sensations de déplaisir. Enfin, l’anxiété est une émotion ressentie comme désagréable, qui combine des symptômes physiques et des pensées anxieuses. C’est pourquoi, les auteurs ont étudié la relation entre les troubles du sommeil et la sensibilité à l’anxiété chez les adolescents, dans le cadre de conflits parentaux.

D’après les études antérieures, les troubles du sommeil sont présents chez les adolescents et responsables d’une anxiété élevée (Brown et al., 2018). Les adolescents rencontrent de plus grandes difficultés à réguler leurs émotions que d’autres groupes d’âges (Palmer et al., 2018). Les conflits parent-adolescent sont présents au cours de cette période de développement et plus intenses au sein des familles dont les membres présentent un niveau d’anxiété plus élevé (Drake & Kearney, 2008). Toutefois, aucune étude n’a associé les différents facteurs (sommeil, anxiété, colère et conflit) et n’a examiné la façon dont les troubles du sommeil et la sensibilité à l’anxiété interagissent dans le conflit parent-adolescent. D’autre part, aucune étude n’a utilisé une tâche identifiée comme source de conflit parent-adolescent pour examiner la colère et l’évitement des adolescents en réponse au conflit provoqué. De plus, aucune étude à ce jour n’a analysé comment la sensibilité à l’anxiété peut affecter ces relations.
Cette constatation a conduit les auteurs à formuler la question suivante : comment interagissent les troubles du sommeil des adolescents et la sensibilité à l’anxiété lors de conflits parent-adolescent ?

Pour y répondre, les auteurs ont porté une attention particulière à la colère provoquée par ces conflits et au comportement d’évitement des adolescents observés lors de ces conflits.

Ils ont ainsi formulé deux hypothèses :
1. Les troubles du sommeil seraient plus importants chez les adolescents ayant un niveau élevé de sensibilité à l’anxiété et de colère lors du conflit.
2. La tendance à éviter le conflit serait plus importante chez les adolescents ayant un niveau élevé de sensibilité à l’anxiété et de colère lors du conflit.

L’étude a été réalisée auprès de 72 adolescents américains âgés entre 12 et 16 ans et de leurs mères qui se sont auto-sélectionnées pour participer à la recherche. Une tâche préalablement identifiée comme source de conflit d’une durée de 5 minutes (p.ex. les tâches ménagères, l’heure de retour à la maison), a été proposée aux adolescents et à leurs mères.Par ailleurs, cinq échelles d’évaluation des émotions négatives ont été présentées aux adolescents et à leurs mères :
1) La sous-échelle de l’excitation anxieuse (AA) du questionnaire sur les symptômes de l’humeur et de l’anxiété (MASQ; Watson & Clark, 1991; Watson et al., 1995) évalue les symptômes liés à l’anxiété.
2) L’indice de sensibilité à l’anxiété chez l’enfant (CASI ; Silverman et al., 1991) évalue le niveau de sensibilité à l’anxiété de l’enfant.
3) L’indice de qualité du sommeil de Pittsburgh (PSQI ; Reynolds et al., 1989) est un questionnaire d’auto-évaluation. Il évalue la qualité et les troubles du sommeil.
4) Une échelle du niveau de colère avant et après le conflit allant de 0 à 100 : 0 = pas de colère ; 100 = colère extrême (SUDS-Anger ; Wolpe, 1958). Elle mesure et compare l’intensité des émotions avant et après le conflit.
5) Une échelle de régulation émotionnelle (IRA ; Werner et al., 2011) visant à évaluer la tendance des adolescents à éviter les conflits avec leurs mères.

Les résultats de cette étude n’ont pas permis de confirmer les hypothèses car les adolescents ayant une faible sensibilité à l’anxiété présentaient une tendance à éviter les conflits, un niveau élevé de colère après le conflit et des troubles de sommeil plus importants que les adolescents ayant une forte sensibilité à l’anxiété.
Quant aux adolescents ayant une forte sensibilité à l’anxiété, ils étaient plus en colère lors de la tâche de conflit mais ils présentaient moins d’attitude d’évitement à l’égard de leurs mères et moins de troubles du sommeil.

Ainsi, cette étude a permis de montrer que les troubles du sommeil chez les adolescents ayant une faible sensibilité à l’anxiété sont plus importants et sont indirectement associés à une tendance à l’évitement lors des conflits. D’autre part, la colère des adolescents pendant le conflit a bien eu un effet sur la relation entre les troubles du sommeil et la tendance à éviter le conflit.
Cette étude permet d’apporter de nouvelles connaissances sur les interactions entre la colère lors du conflit, les troubles du sommeil, la tendance à l’évitement, et le niveau de sensibilité à l’anxiété des adolescents. Toutefois, cette étude présente des limites. En effet, les données portant sur l’évaluation de la qualité du sommeil ont été obtenues par des mesures d’auto-évaluation et non par des mesures objectives (appareils de mesure du sommeil). De plus, les données ont été recueillies à deux moments différents : pendant l’été et l’année scolaire. Les habitudes de sommeil des adolescents ont pu varier au cours de ces deux relevés. Par ailleurs,d’une part, une partie de l'échantillon était composé uniquement de mères ; les pères n’ont pas été intégrés à l’étude. D’autres part les participants se sont auto-sélectionnés et ont perçu une compensation monétaire : la représentativité des résultats peut être questionnée. Par conséquent, une étude complémentaire intégrant les pères serait intéressante afin d’améliorer la compréhension des relations parent-adolescent entre d’une part les troubles du sommeil et la sensibilité à l’anxiété et d’autre part la colère provoquée et le comportement pendant et après les conflits parent-adolescent.

Ainsi cette étude expérimentale a permis de questionner les liens entre les troubles du sommeil des adolescents et leurs sensibilités à l’anxiété lors d’un conflit parent-adolescent, en prenant en compte la colère provoquée par le conflit ainsi que le comportement d’évitement des adolescents observés lors de ce conflit.

RÉFÉRENCES
Brown, W. J., Wilkerson, A. K., Boyd, S. J., Dewey, D., Mesa, F., & Bunnell, B. E. (2018). A review of sleep disturbance in children and adolescents with anxiety. Journal of sleep research, 27(3), e12635.
Drake, K. L., & Kearney, C. A. (2008). Child anxiety sensitivity and family environment as mediators of the relationship between parent psychopathology, parent anxiety sensitivity, and child anxiety. Journal of Psychopathology and Behavioral Assessment, 30(2), 79-86.
Palmer, C. A., Oosterhoff, B., Bower, J. L., Kaplow, J. B., & Alfano, C. A. (2018). Associations among adolescent sleep problems, emotion regulation, and affective disorders: Findings from a nationally representative sample. Journal of Psychiatric Research, 96, 1-8.

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