Pour une vision plus positive de la prise de risque à l'adolescence
Synthèse de l’article : Fryt, J., Szczygieł, M., & Duell, N. (2021). Positive and negative risk taking in adolescence: Age patterns and relations to social environment. New Directions for Child and Adolescent Development, 2021, 127–146. https://doi.org/10.1002/cad.20431
Synthèse rédigée par Pauline JEAN-BART et Nina RABIER-LAGUILLON, Master 2 de Psychologie du développement, Université Paris 8
Et si les adolescents ne prenaient pas que des risques négatifs ?
La prise de risque découle d’une décision impliquant des conséquences imprévisibles, pouvant être positives ou négatives (Figner & Weber, 2011). Cette décision est prise selon une analyse des gains et pertes potentiels, mais aussi du caractère socialement acceptable ou non du comportement au regard des normes sociales (Fryt et al., 2021).
Ainsi, un comportement qui peut impacter positivement le bien-être d’une personne, dont les conséquences négatives peuvent être considérées comme minimes, ou qui est socialement acceptable, peut être considéré comme une prise de risque positive (Duell & Steinberg, 2019), par exemple inviter quelqu’un à un rendez-vous galant. Au contraire, une prise de risque négative peut impliquer de graves conséquences pour la santé et/ou est considérée comme antisociale ou illégale, par exemple une consommation excessive d’alcool.
Cependant, la littérature scientifique peine à nous renseigner sur les similitudes et les différences entre prise de risque positive et négative. De plus, les connaissances manquent quant aux facteurs qui motiveraient les adolescents à prendre des risques positifs.
Fryt et al. (2021) ont donc réalisé une étude visant à comparer les prises de risques positives et négatives en fonction de l'âge chez des adolescents et des jeunes adultes âgés de 12 à 25 ans. Pour mettre en évidence les facteurs prédicteurs de ces prises de risques, les auteures ont aussi évalué la prise de risques des pairs, la perception du risque et le soutien social perçu, et ce uniquement chez les individus âgés de 12 à 18 ans.
Qui sont les participants de l’étude ?
388 élèves, âgés de 12 à 25 ans, ont été recrutés au sein d’écoles professionnelles et techniques, de lycées, et d’universités en Pologne.
Comment s’est déroulée la recherche ?
Les participants ont rempli des questionnaires en ligne évaluant 4 aspects distincts (voir tableau 1) :
Leur propre engagement dans la prise de risque positive et négative (PRTS/NRT)
La perception du caractère risqué de chaque situation (PRTS/NRT)
La perception de l'engagement de leurs pairs dans la prise de risque positive et négative (PRTS/NRT)
Leur perception du soutien social perçu de la part de la famille, des amis et d'une personne spéciale (MSPPS)
Tableau 1 : Présentation des questionnaires utilisés
Quels résultats ont pu observer les chercheuses ?
Prise de risque positive et négative en fonction de l’âge
Dans l'ensemble, les participants ont rapporté avoir pris significativement plus de risques positifs que de risques négatifs.
Concernant la prise de risque négative, les adolescents et les jeunes adultes ont rapporté prendre plus souvent des risques pour la santé que des risques antisociaux.
Enfin, la prise de risque positive ne variait pas de manière significative avec l’âge. Néanmoins, ils ont constaté un pic de la prise de risque négative concernant la santé au début de l’âge adulte.
Prédicteurs de la prise de risque positive et négative
Le soutien familial perçu, la prise de risque des pairs, ainsi que la perception du risque peuvent prédire la prise de risque positive et négative. En effet, un faible soutien familial perçu et une prise de risque positive des pairs sont associées à la prise de risque positive.
Par ailleurs, la prise de risque négative est associée à un faible soutien perçu, mais aussi à une prise de risque négative des pairs, et à une faible perception du risque négatif.
Tableau 2 : Résumé des prédicteurs de la prise de risque positive et négative
Que retenir ?
La prise de risque positive est plus fréquente que la prise de risque négative. Cela peut découler du fait que la prise de risque positive est socialement plus acceptable que la prise de risque négative. De plus, les risques positifs sont perçus comme moins risqués.
La prise de risque positive ou négative des adolescents peut être déterminée par le type de risque pris par les pairs, le faible soutien perçu, ainsi que la perception du risque”
Pertinence de l’étude pour le grand public
Offrir une nouvelle perspective sur les prises de risques à l’adolescence en appréhendant ses aspects positifs, et en s’éloignant ainsi des stéréotypes négatifs que l’on peut avoir sur les adolescents.
Apporter une meilleure compréhension des facteurs qui motivent les adolescents à prendre des risques, pour prévenir les prises de risques négatives et encourager les prises de risques positives.
Quelques limites
Évaluer la “perception” qu’ont les participants de la prise de risque de leurs pairs ne permet pas de déterminer avec certitude si ces croyances correspondent à la réalité.
En raison de la conception transversale de l’étude, il est difficile d'examiner comment les facteurs de l'environnement social des adolescents influencent leurs futures de prise de risque.
Ouverture
Afin d’encourager les prises de risques positives chez les adolescents, les recherches futures pourraient se concentrer sur l’évaluation des avantages (récompenses) associés aux risques. Il serait aussi souhaitable d’approfondir les facteurs sociaux pouvant encourager ou décourager les prises de risques positifs.